Disclaimer : cet article tente humblement de vulgariser et simplifier des concepts issus de la littérature RH afin d’en dégager des pistes de solutions concernant des problématiques RH actuelles rencontrées en entreprise.

Le décalage culturel

Rappelez-vous la fois où vous avez intégré une nouvelle entreprise. Vous étiez enthousiaste, mais après quelques semaines, quelque chose ne tournait pas rond. Un écart s’était creusé entre ce que vous viviez et le discours entendu lors de votre recrutement.

Ce qui devait être une belle aventure s'est transformé en désillusion, aussi bien pour vous que pour l'entreprise : perte de confiance mutuelle, démotivation et potentielle fin de période d'essai. Vous ressentez alors une amertume et vous vous dites : « On m’a menti ».

Pourtant, il est peu probable que l’entreprise vous ait délibérément trompé. Ce que vous ressentez est souvent le résultat d’un découplage (1) entre différentes facettes de l’identité de l’entreprise. L’identité d’entreprise est le terreau dans lequel se développe sa culture qui en est une concrétisation visible.

Cette identité se divise en 5 facettes (2), dont quatre nous intéressent particulièrement.

1. L’identité professée correspond à la vision que l’organisation a d'elle-même, généralement celle de la direction, et qu’elle communique. C'est le discours que vous avez entendu lors de votre entretien.

2. L’identité projetée est l'image renvoyée par les actions de communication et de marketing de l’entreprise à ses parties prenantes (clients, grand public, talents à attirer, etc.).

3. L’identité vécue correspond à la perception qu’ont les salariés de l’entreprise. Vous y compris.

4. L’identité manifestée : C'est l'image renvoyée par les actions de l’entreprise en dehors des campagnes de communication, comprenant la culture d’entreprise, son organisation et son historique. (La "réalité du terrain" en quelque sorte.)

Dans votre cas, le découplage se situe probablement entre l’identité professée (le discours entendu lors de l’entretien) et l’identité manifestée (ce que l’entreprise montre réellement par ses actions). Cela conduit à une perception négative de l’entreprise, probablement éloignée de celle imaginée par ses dirigeants.

Ces écarts sont malheureusement fréquents, mais rarement intentionnels. L’entreprise a tout intérêt à maintenir la congruence entre ces facettes de son identité pour assurer son développement.

Se prémunir de "l'erreur de casting"

Il est possible de déceler ces découplages dès l’entretien de recrutement en utilisant des techniques d’audit d’identité.

Voici quelques pistes :

• Posez des questions sur les valeurs de l’entreprise. Demandez à vos interlocuteurs de définir ces valeurs et de fournir des exemples concrets les illustrant. Très fréquemment, il peut y avoir un écart entre votre définition et la définition de l’entreprise sur une même valeur. Recontextualiser permet de s’assurer que vous partagez bien la même définition.

• Interrogez-les sur les habitudes et les événements récurrents de l’organisation (par exemple, le séminaire annuel : que présente-t-on ? Qui y est invité ?). Là encore, vous aurez une meilleure visibilité sur l'identité manifestée de l’entreprise. Si cette dernière vous a été présentée comme transparente, avec une organisation aplatie, mais que seuls les managers sont invités pour la présentation de la nouvelle stratégie de l’entreprise, vous êtes probablement en présence d’un découplage.

• Observez les différences de discours entre vos interlocuteurs durant le processus de recrutement. Le recruteur et le manager ont-ils la même image de l’entreprise et la communiquent-ils clairement ?

Cette liste n’est bien évidemment pas exhaustive et ne garantit pas une détection systématique des écarts entre les identités de l’entreprise, mais elle peut aider à réduire le risque de désillusion.

1 Strategor: toute la stratégie d’entreprise. 6e éd. Paris: Dunod; 2013.

2 Moingeon B, Soenen G. Corporate and Organizational Identities : Integrating Strategy, Marketing, Communication, and Organizational Perspectives. 2002.